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Si ça ne vient pas de l'AFP c'est que ça n'est pas réellement arrivé!


Mourinho, l’alibi «Special One» pour mafieux

Publié par Desmoulins sur 14 Novembre 2016, 12:48pm

Catégories : #Camorra, #Sport, #Outsider

(article publié sur Outsider Mag le 13/05/14)

 

On sait que les Napolitains sont de grands amateurs de football et évidemment les camorristes (comprenez les affiliés de clans de la Camorra, la mafia de Naples et de sa région, la Campanie) ne dérogent pas à la règle. On peut citer le capoclan (boss) de Scampia qui parade dans son quartier accompagné de Mario Balotelli en 2010 avec ce dernier qui se serait essayé au deal pour rigoler selon le repenti Armando De Rosa. Ce dernier avait même affirmé que durant des années les clans de Scmpia organisait un tournoi de foot annuel au nez à la barbe des policiers. Ou bien encore, nous pouvons parler d'Antonio Lo Russo un boss du quartier de Miano qui bien qu'en cavale, été pris en flag en photo au bord de la pelouse lors d'un match au San Paolo. San compter les nombreux mafieux interpellés en habit de lumière, sweats et t-shirt du Napoli et même du Paris Saint Germain. Le napolitain semble apprécier le club de la capitale français comme en témoigne cette vidéo de la reconstitution d'un meurtre camorriste  https://www.youtube.com/watch?v=XkvlApvo8vE (à la 20ème seconde)

On pensait avoir tout vu, mais non il y a encore eu mieux.

En avril dernier, trois leaders camorristes du clan Amato-Pagano (un des clans les plus dominants à Naples, originaire de Secondigliano un quartier du nord-est de la ville et acteur important des dernières guerres mafieuses depuis 10 ans), actuellement en prison pour une affaire de règlement de compte, sont accusés par des repentis d’être les instigateurs d’un assassinat, celui de Carmine Amoruso tué le 5 mars 2006 dans une salle de bingo à Mugnano (sur fond de guerre de clans à Scampia, un quartier de Naples). Les policiers s’appuient notamment sur les déclarations de deux repentis camorristes et collaborateurs avec la justice, Antonio Parolisi et Andrea Pica. «C’est Rito Calzone qui était à Mugnano ce jour-là», affirment les deux hommes. Or les avocats des trois prévenus ont fait parvenir au juge une série de photos où l’on voit les trois compères prendre la pause avec des joueurs de football de Chelsea (Crespo, Lampard et Morais) ainsi qu’avec leur entraîneur José Mourinho (enfin lui il n’a pas vraiment posé, il avait l’air pressé).

Rito Calzone à gauche, Mourinho, Carmine Amato et Carmine Pagano (credits Roma)

Rito Calzone à gauche, Mourinho, Carmine Amato et Carmine Pagano (credits Roma)

Mais ça prouve quoi me direz-vous ? Et bien, ces photos ont été prises entre le 3 et le 6 mars 2006 à Barcelone dans l’hôtel où est descendue l’équipe de Chelsea avant d’affronter le FC Barcelone en ¼ de finale de la Champions League. Et ces photos ont même été publiées dans le quotidien «Roma» (qui est un journal napolitain même si ne ça saute pas aux yeux). C’est Fabio Postiglione, le chroniqueur judiciaire du quotidien qui a découvert ces photos. Il a été le premier à les publier. L’hôtel a été dûment identifié et un ressortissant espagnol a témoigné de la présence des 3 hommes à l’hôtel. Pour les avocats, il n’en faut pas plus pour demander au juge la libération immédiate de leurs clients. Les 3 hommes, Carmine Pagano, Carmine Amato et Rito Calzone ont qui plus est fourni les factures de leur séjour de 3 jours dans cet hôtel à 7000 € la nuit et par personne ainsi que les billets d’avion attestant de leur voyage. Honnêtes les gars non ?!

Calzone à gauche avec des joueurs de Chelsea (dont Crespo) (credits Roma)

Calzone à gauche avec des joueurs de Chelsea (dont Crespo) (credits Roma)

L’affaire est depuis plusieurs mois entre les mains du Procureur général. Il décidera ou non de l’abandon ou de la poursuite des accusations dans cette affaire. En tout cas, l’alibi des trois hommes ne manque pas d’originalité.

Calzone avec Lampard (credits Roma)

Calzone avec Lampard (credits Roma)

Rito Calzone est un homme bien connu à Secondigliano et son frère – Carmine – est l’un des leaders du quartier. De surcroît, son nom a déjà été associé à des incidents liés à des matchs de foot.

Un dimanche matin, le 31 août 2008, c’est le premier match de la Serie A mais surtout le retour du SS Napoli en première division et le calendrier offre aux napolitains un voyage à Rome pour y affronter la Roma (club honni depuis des affrontements très sérieux en 2001 avec des images qui ont fait le tour du pays et même au delà). Plus de trois mille ultras partenope sont présents dans le train qu’ils auraient plus ou moins « emprunté » en poussant quelque peu les voyageurs provoquant rixes et bagarres. En tout, quatre employés des chemins de fer sont blessés. Ils arrivent ainsi dans la gare de Rome de Termini. Les images font alors le tour du monde. Au premier plan, un homme exhorte et encourage tous ses comparses à sortir du train. Mais il réalise qu’il est recherché et couvre son visage avec une écharpe. Cet homme, c’est Rito Calzone, 34 ans à l’époque. Il n’est pas arrêté après les affrontements, mais le 1er septembre 2009, il finit en prison pour un assassinat. Il est accusé d’avoir tué Antonio Pitirollo, le cousin de Hugo De Lucia, le tueur attitré du clan Di Lauro (ex-clan régnant de Scampia mis à mal lors de la faide de Scampia, une guerre mafieuse au milieu des années 2000) et condamné à la prison à vie pour l’assassinat de Gelsomina Verde (une jeune femme innocente tuée par les Di Lauro parce qu’elle était la petite amie d’un membre du camp adverse).

Napolitains à la station Termini de Rome.

Déjà arrêté pour détention d’armes avec quatre autres complices, puis libéré par la Cour de révision, il est — cette fois-ci — arrêté seulement deux jours après le crime. Calzone est accusé par un témoin oculaire. Il est pointé du doigt avec son frère Carmine (qui est arrêté en juillet 2009). Il échappe à une embuscade le 23 février 2008 où il est blessé au bras. Nous retrouvons les deux frères sur le banc des accusés en mai 2010 lors du gigantesque procès des « dissidents de Scampia ». Ce jour-là, lui et son frère sont condamnés : 11 ans et 4 mois pour Carmine et 14 ans pour Rito.

"J'ai des antécédents"

De fait lors des graves incidents survenus durant le déplacement à Rome du 31 août 2008, de nombreux ultras napolitains interpellés par la Police ont déjà des antécédents judiciaires en lien avec des groupes camorristes. La police — après vérification — a indiqué que parmi les tifosi, beaucoup font l’objet d’une enquête. 260 sont fichés pour infractions aux lois sur les stupéfiants, 419 pour vol, cambriolages, 218 pour agressions, 70 pour détentions d’armes et 71 pour violations de lois sur l’ordre et la sûreté publique. Les ultras napolitains ont d’ailleurs organisé quelques jours plus tard une manifestation d’ampleur pour protester contre cet amalgame fait par le Ministère de l’Intérieur en portant un tee-shirt sur lequel était inscrit « Io ho precedenti penali » (qu’on peut traduire par « j’ai des antécédents » /

Manifestations des ultras napolitains

Ces liens sont connus, mais ils sont beaucoup plus complexes qu’il n’y paraît, liens familiaux comme pour le fameux Genny la Charogne (dont le papa a fait partie du clan Misso), liens commerciaux sur le business des parcheggiatori (parkings) près du stade ou des marchands ambulants de produits dérivés du club (et qui le pénalise grandement) ou du trafic de stupéfiants. Aujourd'hui chaque groupe napolitain se doit d'avoir un référent camorriste (à l'image du fameux Bandito des Fedayn) en son sein afin de pérenniser sa présence au stade. Les connivences sont légion et même avec certains joueurs du club, qui naïvement s'accoquinent avec des loups couverts d'une peau de mouton. L’ombre de la Camorra sévit partout dans cette cité ensoleillée.

Mais c'est une autre histoire.

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